Le corps médicament : approche bio-culturelle

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Date de début

Au

Date de fin

Ce projet inter-équipe portera sur un cas de figure spécifique où le corps du patient est soigné aux moyens des ressources du corps d’autrui. En la circonstance, le corps n’est plus seulement le réceptacle des traitements mais devient lui-même un moyen de traitement à disposition de patients en situation de péril vital (personnes leucémiques, drépanocytaires, etc.). Durant la seconde moitié du XXème siècle, la transfusion sanguine a été à l’avant-garde du développement de la biomédecine. Ses progrès se poursuivent aujourd’hui à travers l’utilisation des biomatériaux humains qui occupent une place croissante dans l’arsenal thérapeutique du médecin. Le sang devient un élément incontournable dans les thérapeutiques complexes comme la greffe, la transplantation ou la mise en œuvre de chimiothérapies. Par sa forte transversalité, le sang est omniprésent dans un large éventail de stratégies de soin, au point que les spécialités médicales qui n’ont jamais recours à la transfusion deviennent plutôt l’exception que la règle. L’efficience thérapeutique des produits à base de sang tient à l’utilisation des biomatériaux humains qui associent deux champs de recherche :
•    Le volet « biologique » dont l’objectif est de décrire et de comprendre le polymorphisme génétique des marqueurs impliqués dans la sécurité immunologique des transfusions, greffes ou transplantations
•    Le volet « culturel » ayant pour objectif de comprendre les déterminants culturels du don d’éléments du corps en vue d’assurer la disponibilité et l’approvisionnement en produits sanguins.
La compatibilité immunologique entre « corps donneur » et « corps receveur » prend en compte des données de recherche issues des travaux de l’axe « diversité génétique des groupes sanguins et ses impacts médico-anthropologiques » de l’équipe « GENGLOBE » qui décrit la géographie de ces polymorphismes dans différentes populations du monde permettant d’identifier les populations potentielles qui doivent être converties en populations de donneurs.
L’approvisionnement en produits sanguins compatibles passe par la motivation au don du sang qui met à contribution des approches socio-anthropologiques. Sur un plan éthique et juridique, le prélèvement de sang pose la question de l’arbitrage des valeurs entre l’incitation (pour le bien des patients en attente) et le respect du volontariat (qui protège les donneurs de toute pression sociale). Le prélèvement du sang fait l’objet d’un questionnement aigu dont les chercheurs de ce projet entendent se saisir pour questionner la pertinence du modèle « éthique » du don, au regard du contexte actuel. Les problèmes porteront sur les valeurs de gratuité et la réciprocité dans le don de sang, la marchandisation

des dérivés du sang, la mise à disposition du sang, les particularités du don lié aux groupes sanguins rares. La réflexion éthique comportera un volet dédié aux modes des reconnaissance des donneurs (gratifications symboliques, avantages indirects, etc.).
Les anthropologues de la santé seront également mobilisés pour analyser les représentations du corps en tant que biomatériau. Dans son versant anthropologique, la recherche sur le don de sang se matérialisera à travers l’étude de l’impact des appartenances culturelles et des évolutions sociologiques contemporaines sur les conduites des donneurs. Les productions issues de ce projet ont pour but, d’une part, d’enrichir la connaissance en droit de la bioéthique (dans un domaine relativement peu exploré par les SHS) et, d’autre part, d’alimenter les bases de données de l’Etablissement Français du Sang (EFS) au travers de la structure « Social-Lab ». Cette institution publique récemment instaurée est un laboratoire d’idées qui a pour but d’intégrer les données issues des sciences humaines et sociales dans l’élaboration des politiques de communication et d’organisation des collectes. Ce partenariat entre UMR ADES et Social-Lab se construira sur la base d’un travail de recherche pilote déjà effectué lors du précédent contrat sur le profil sociologique des nouvelles générations de donneurs de sang. L’équipe entend développer les savoirs disponibles sur les pratiques actuelles du don de sang en France comme ailleurs, et sur les processus de fidélisation des donneurs dans un cadre institutionnel éthiquement acceptable.
Pour être mené à bien, ce projet bénéficiera du renfort d’un chercheur en anthropologie de la santé, d’une sociologue de la santé et dans le cadre d’une convention en cours de signature de chercheurs en anthropologie de la santé dont Yannick Jaffré (UMI Environnement, santé, sociétés, Institut de France, Académie des sciences) ainsi que le Dr. Hélène Kane, maitre de conférences en anthropologie en santé (UFR de Rouen, département « Anthropologie et les inégalités sociales de santé
»).

 

Équipe de rattachement

Type de financement

Autre

Montant total

392 000 euros