Le modèle « soi/non-soi » repose sur le raisonnement par analogie décrié de longue date par les épistémologues, au même titre que le recours à des métaphores empruntées à la vie sociale qui conduisent à penser l’auto-normativité du corps sur le modèle d’une communauté de pathogènes en compétition (pathogènes tolérés par le « soi » en tant qu’entités endogènes) mais suffisamment unifiés pour lutter contre des agents extérieurs potentiellement agresseurs. L’explication d’une norme vitale à partir du fonctionnement d’une norme sociale est un postulat qui se prête à diverses objections (extrapolation abusive du modèle, historiquement situé, de l’économie libérale dans le champ du vivant, etc.).
Pour autant, la critique de l’interprétation analogique du phénomène immunitaire n’implique nullement la faillite de toute tentative de théorisation. La crise théorique contemporaine de l’immunologie doit bien plutôt lui communiquer une nouvelle impulsion, tant il est clair qu’une science a besoin d’un cadre d’intelligibilité structurant pour pouvoir progresser et coordonner ses domaines de recherche. Dans ce contexte ouvert à la créativité intellectuelle, les chercheurs de l’axe 3 tenteront de monter en puissance progressivement au cours des cinq années à venir, afin d’être en mesure de participer à l’effort international d’élaboration de nouveaux outils théoriques capables de comprendre un processus immunitaire au statut paradoxal, à la fois fermé et tolérant au non-soi, stable et interactif.